Ça y’est le voyant rouge vient de s’allumer, vous êtes  à sec. Toutes les limites de votre réservoir d’affection, d’amour et même d’espérance pour cet enfant sont épuisés. Vous dites « cet » enfant, vous n’êtes même plus sûre qu’il s’agit du votre.

Aberration ultime. Vous ne pouviez imaginer un jour en arriver là. « Qu’est ce qui coince avec celui là ?  »

Evidemment vous vous questionnez. Vous savez bien au fond de vous que, depuis trop longtemps, il est celui  dans la fratrie, que, malgré vos efforts, vous n’arrivez pas à comprendre. Si il y en a un qui fait les choses à l’envers, c’est lui. Il est allé trop loin. Et vosu avez cette desagréable impression d’habiter sur 2 continents différents…

Nos enfants ont besoin qu’on les rêve qu’on les projette. Je ne parle pas d’une projection enfermante du type : « un jour tu seras prêtre, banquier, artiste ou, que sais-je… ». Je parle plutôt de cette confiance fondamentale  que, quoiqu’il arrive, notre enfant rebondira, s’en sortira, fera les justes choix, et deviendra celui qu’il est profondément.

Comme l’écrit si bien Kalil Gibran:

« Vous êtes les arcs par qui vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés ».

Alors que se passe t-il quand ce rêve de votre enfant devient votre pire cauchemard?

Bien souvent, la peur ou la colère sont les racines de ce mal être relationnel. Cels émotions sont suscitées chez nous par un enfant qui semble avoir un caractère trop différent de nous. Ou peut-être qu’à l’inverse, tel un élastique trop tendu, cet enfant nous ramène brutalement le passé, et notre propre histoire en pleine face. Il vient comme un miroir de ces parties de nous-mêmes, blessées qui nous sont trop insupportables : «  je déteste voir à quel point elle peut protester sur tout, moi qui n’est jamais eu voix au chapitre au sein de ma propre famille! »,  Bing, et chaque fois, vous  prenez l’élastique dans la figure….sans le voir venir ! Et chaque fois, l’amertume s’accumule…

Et si, saisissant votre courage, vous suiviez cet élastique pour aller regarder et écouter cet enfant que vous étiez ? C’est aussi en vous réconciliant avec cet enfant intérieur que vos propres enfants pourront gagner en liberté d’être.

Courant sont les enfants qui, malgré eux, se retrouvent à affirmer ce que nous n’avons pas pu affirmer petit. Il se font un peu les porte-paroles de nos blessures, de ce que nous avons tu comme pour rétablir une sorte d’équilibre dans la grande balance des générations.

Il arrive aussi parfois qu’un enfant se face l’écho d’une relation difficile de notre histoire familiale.

Si on ose bien se l’avouer, c’est fou le nombre de fantasmes que l’on peut nourrir en tant que parents à ce sujet. Si on ose se l’avouer… Et oui, car bien souvent, ces personnes de notre famille planent, tel des cerfs volants, au dessus de nos têtes, quelque peu à notre insu : cet oncle qui a finit dans l’alcoolisme, cette grand mère qui tombe enceinte à 15 ans et fait la honte de sa famille. Ce frère qui vit reclu chez lui et avec lequel nous n’avons plus de contact. Nos enfants viennent réveiller malgré eux toutes ces souffrances familiales enkystées et deviennent parfois la piste d’attérissage de ce qui n’ a pas été dit, réglé, consolé, transformé.

Et pourtant, c’est bien à nos poignets que sont accrochés ces cerfs volants.

Et si vous leviez  les yeux pour prendre conscience de leur présence et de la façon dont ils vous emportent parfois avec eux au grès des vents ? Une façon de se détacher de toutes ces images projetées qui paralysent votre relation et votre regard sur cet enfant ? Une façon de souffler un vent de liberté  sur vous et votre descendance ?

 

Anouck Boulet de Bohan, 06 63 60 31 83, 74 rue de Patay, Paris 13 / 17 rue des Fossés Saint Marcel, Paris 5